Le périple de Suleiman : « Les Restos du Cœur m’ont bien aidé et j’ai réussi à m’en sortir »

9 mai 2025

Du Soudan aux Restos du Cœur d’Orléans en 2025, le périple de Suleiman recoupe la destinée de nombreuses personnes demandeuses d’asile dans ce qu’elle peut avoir de plus éprouvant et de plus résilient aussi. Ancienne personne accueillie à l’aide alimentaire, devenue bénévole, le trentenaire retrace le parcours ascensionnel qu’il impute en partie au coup de pouce de l’association.

« Ça n’a pas été facile, mais je devais partir car mon pays était en guerre et c’était une question de vie ou de mort », raconte Suleiman, 37 ans, père de 3 enfants. Son parcours a été long depuis le Soudan. Une fois en France, « les Restos du Cœur m’ont bien aidé et j’ai réussi à m’en sortir ».

Un parcours à haut risque depuis le Soudan jusqu’en Italie

Rencontré à Orléans, sa ville d’adoption, ce Soudanais de 37 ans, se remémore avec émotion et dans un français impeccable l’incroyable périple qui l’a conduit de la région du Darfour, à l’ouest du Soudan, jusqu’en France où il vit désormais avec sa femme et ses trois enfants. Un parcours à haut risque, commencé en juillet 2014 par la traversée du Sahara en camion tout-terrain, sept jours durant avec une trentaine d’autres réfugiés et confronté au manque d’eau et de nourriture. Puis la Libye où il est emprisonné dès son arrivée avec ses compagnons d’infortune, et d’où il ne sortira qu’une semaine plus tard en payant une forte somme. Et enfin, après neuf mois de petits boulots pour gagner le prix de la traversée, un bateau de pêche jusqu’en Sicile, et la France !

Deux ans d’attente pour les papiers et la rencontre avec les Restos

Ce n’était que le début d’une autre histoire, beaucoup moins dangereuse, mais souvent désespérante. Dès son arrivée en France, fin 2015, Suleiman fait une première demande d’asile avec l’aide d’une association d’aide aux réfugiés de Blois. Première demande, premier refus. Un choc. « Ce refus m’a fait du mal, parce que je n’en ai pas compris la raison. »

Cela a duré deux ans, hébergé dans un centre d’accueil à Orléans, sans avoir le droit de travailler, ni de faire une formation. Un calvaire pour l’ancien étudiant en électricité qui ne demandait qu’à trouver un emploi et s’intégrer. « J’ai compris que ce serait long et j’ai cherché un peu d’aide pour m’en sortir et compléter les 200 euros de l’allocation aux demandeurs d‘asile. C’est à ce moment-là que j’ai rencontré les Restos du Cœur.»

Inscrit à l’aide alimentaire, il suit dans le même temps des cours de langue aux ateliers de français animés par des bénévoles de Restos pour progresser. « Je ne parlais pas très bien, mais tout le monde m’a aidé en n’hésitant pas à corriger mes fautes. Dès qu’on parle mieux, tout devient plus facile ! »

Comme 10 à 15% des personnes accueillies devenues bénévoles aux Restos, Suleiman prête bientôt main forte à l’association : intégrant les équipes bénévoles, il récupère les invendus et décharge les camions à l’entrepôt, histoire de « rendre un peu de ce que l’on m’avait donné.»

Un courage et une volonté qui forcent l’admiration

En 2018, sa demande d’asile est enfin acceptée. Une vraie délivrance. « C’est mon meilleur souvenir ! », dit-il aujourd’hui. Dès lors, avec ce titre de séjour, tout devient possible. Les Restos du Cœur lui proposent un contrat en insertion aux Jardins du Cœur. Bientôt, Suleiman enchaîne par une formation de technicien de maintenance industrielle avec Pôle Emploi durant sept mois. Au terme de sa formation, l’entreprise lui propose de l’embaucher. Mais sans permis de conduire, pas de contrat possible. Qu’à cela ne tienne ! Suleiman travaille quelque temps comme coursier pour Uber Eats et obtient une aide pour passer son permis… avec en tête un projet de création d’entreprise ! Ce sera chose faite en 2021, avec l’achat d’une camionnette et le début d’une activité de vente de vêtements sur les marchés de la région. Le demandeur d’asile est devenu entrepreneur.

Un message d’espoir pour sortir de la précarité

Entretemps, Suleiman a fait une demande de visa pour faire venir sa femme Aisha restée au pays et qu’il n’avait pas vue depuis cinq ans. Le couple s’est retrouvé en 2020 à Orléans et trois enfants naîtront de cette belle aventure. Une incroyable réussite qu’il n’aurait sans doute pas osé imaginer en 2014 quand il est monté dans ce camion qui l’emmenait vers l’inconnu. Au-delà de l’aide qui lui a été apportée en France, c’est à son courage et à sa farouche volonté qu’il doit cette réussite. « Pendant toutes ces années j’ai gardé confiance, je voulais réussir et de toute façon, je ne pouvais pas revenir en arrière. » Un message d’espoir qu’il souhaite aussi partager, en aidant les membres de l’association d’entraide qu’il a créée pour les réfugiés Soudanais et qui regroupe déjà une centaine de familles. Solidarité quand tu nous tiens…