Précarité alimentaire, familles monoparentales, jeunes en difficultés… qui sont les personnes accueillies aux Restos ?

21 novembre 2025

Aux Restos du Cœur, le trois quart des familles accueillies vivent avec moins de 644 euros par mois. Soit deux fois moins que le seuil de pauvreté. C’est le constat accablant fait par l’Observatoire des Restos dans sa dernière étude sur la campagne 2024-2025.

Crédit photo : © Pascal Vila

« Les privations, c’est tous les jours, tout le temps, le nez dans ma calculette ». Cette triste réalité quotidienne, cette mère de trois enfants, accueillie aux Restos du Cœur, n’est pas la seule à la vivre.

Aux Restos du Cœur, 77 % des familles accueillies vivent avec deux fois moins que le seuil de pauvreté, soit 644 euros. Un chiffre en hausse de 7 points depuis l’année dernière et de 17 points depuis 2022. Et plus de 30 % des familles accueillies déclarent ne disposer d’aucune ressource pour vivre.

C’est ce que révèle la dernière étude 2024-2025 de l’Observatoire des Restos, sur les personnes accueillies à l’aide alimentaire, durant la campagne 2024-2025.

Des chiffres à mettre en parallèle avec les 15,4 % de la population qui, en France métropolitaine, vivent sous le seuil de pauvreté, le taux le plus élevé depuis la création de l’indicateur, il y a une trentaine d’années.

Les familles monoparentales et les enfants en première ligne

Sans surprise, les plus touchés sont les plus jeunes et les familles monoparentales, et, par voie de conséquence, les femmes. La tranche des enfants de moins de 5 ans représente, à elle seule, 15 % des personnes accueillies. Ces chiffres font écho à la dernière publication de l’INSEE, qui indique que 22 % des enfants vivent en situation de pauvreté en France.

Selon les dernières données du CREDOC, entre 7 et 16 % de la population française est concernée par une forme ou une autre de précarité alimentaire : moins de repas pris par jour ou portions réduites, inquiétude du lendemain face au manque, ou impossibilité de se nourrir avec des aliments équilibrés.

Les familles monoparentales constituent une catégorie particulièrement exposée. Majoritairement composées de mères seules avec enfants, elles doivent continuer à assurer leur rôle de parents face au manque d’argent, tout en rencontrant des obstacles importants dans l’accès à un emploi stable, à un logement adapté ou à des modes de garde.

Cette accumulation de difficultés les rend particulièrement vulnérables. Elles sont parmi les plus fragilisées socialement et économiquement. 34 % d’entre elles vivent sous le seuil de pauvreté.

Autre population en difficulté croissante : les jeunes. Selon l’INSEE, au premier trimestre 2025, 12,8 % des jeunes de 15 à 29 ans, en France métropolitaine, n’ont ni emploi ni formation. Sans oublier les étudiants, qui sont loin d’être épargnés. Les jeunes, qu’ils soient en recherche d’emploi ou en cours d’études, sont désormais fortement exposés à la pauvreté ou à l’insécurité alimentaire.

Plus généralement, 44 % des personnes accueillies aux Restos du Cœur sont demandeuses d’emploi, un taux presque six fois supérieur à la moyenne nationale estimée à 7,5 % en 2024. Pour la plupart, elles louvoient dans une sorte de « zone » grise entre emploi, précarité et inactivité.

Travail, logement : un enchaînement de fragilités

Ces constats confirment que la situation des personnes accueillies n’est pas marginale, mais symptomatique d’un déséquilibre profond dans l’accès aux ressources économiques et symboliques offertes par l’emploi. Sans travail, difficile, voire impossible, de trouver un logement. À plus forte raison pour les personnes d’origine étrangère.

En 2024, la crise du logement en France atteint un niveau critique : près de 350 000 personnes sont sans domicile fixe, un chiffre qui a plus que doublé depuis dix ans. La demande de logement social atteint un record de 2,7 millions de ménages en attente.

Un besoin d’accompagnement global

Bien au-delà des aspects matériels, c’est d’un accompagnement global dont les personnes ont besoin. Cet accompagnement ne peut plus se limiter à l’aide alimentaire, mais intégrer l’insertion professionnelle et sociale, l’accès au logement, aux droits fondamentaux comme le fait de pouvoir se soigner, un soutien psychologique et une revalorisation des personnes.

Dans ce contexte morose, rien d’étonnant à ce que les dernières campagnes des Restos aient été marquées par une hausse significative des inscriptions à l’aide alimentaire. Non seulement les personnes accueillies sont plus nombreuses, mais elles viennent plus souvent et plus régulièrement dans les lieux de distribution.

Face à cette réalité, il est impératif de poursuivre et de renforcer l’action des Restos du Cœur.

Face à cette réalité, il est impératif de poursuivre et renforcer l’action des Restos du Cœur.

  1. Le seuil de pauvreté est fixé par convention à 60% du niveau de vie médian de la population, soit à 1288 euros par mois pour une personne seule et 2705 euros pour un couple avec deux enfants âgés de moins de 14 ans.
  2. INSEE (Institut national de la statistique et des études économiques)
  3. CREDOC (Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie)
Alors que les Restos du Cœur assurent près de 35% de l’aide alimentaire distribuée en France, cette étude sur les personnes accueillies de l’Observatoire a été réalisée dans 2318 centres. Au total, les chiffres analysés portent sur 560 000 ménages et 1 266 039 personnes accueillies entre avril 2024 et mars 2025, ce qui correspond à l’activité opérationnelle des Restos 2024-2025.